Haïti: la création d’une force internationale se précise pour lutter contre la violence des gangs

Le premier ministre haïtien, Ariel Henry, le secrétaire d’Etat américain, Antony Blinken, et le secrétaire d’Etat kenyan aux affaires étrangères, Alfred Nganga Mutua, à New York, le 22 septembre 2023. BING GUAN / AP
La mise en place d’un tel soutien, sous la houlette du Kenya, ne va pas assez vite pour le premier ministre haïtien, qui a appelé à nouveau l’ONU à « agir » de façon urgente.

Après des mois de tractations, les contours d’une force internationale de police pour aider Haïti, en proie à la violence des gangs, commencent à se dessiner. Les Etats-Unis ont annoncé, vendredi 22 septembre, que plusieurs pays entendaient contribuer sous la houlette du Kenya à cette force que réclame Haïti depuis un an. Mais sa mise en place prendra sans doute quelques mois encore, sans oublier un délai supplémentaire pour son déploiement effectif, au grand désespoir du premier ministre haïtien.

« Le quotidien du peuple haïtien est pénible, c’est pourquoi le Conseil de sécurité (…) doit agir en urgence en autorisant le déploiement d’une mission multinationale de soutien à la sécurité, policière et militaire », a imploré Ariel Henry, vendredi, à la tribune des Nations unies (ONU), alors qu’un vote est attendu sous peu, peut-être la semaine prochaine. « Je demande à la communauté internationale d’agir, et d’agir vite », a-t-il insisté, listant les horreurs que les gangs font vivre à sa population.

« Les enlèvements contre rançon, les pillages, les incendies, les récents massacres, les violences sexuelles et sexistes, le trafic d’organes, la traite des personnes, les homicides, les exécutions extrajudiciaires, le recrutement des enfants soldats, les blocages des routes principales », a-t-il égrené.

Dix à douze pays impliqués

Les gangs, qui contrôlent la majeure partie de la capitale de ce pays pauvre des Caraïbes et font régner la terreur, ont fait plus de 2 400 morts depuis le début de l’année, selon l’ONU. La police nationale haïtienne n’est pas cependant en mesure de les affronter, d’où l’idée d’une force multinationale en soutien à ce pays qui connaît de multiples crises, politique et humanitaire.

« De dix à douze pays ont fait des offres concrètes pour cette mission » de soutien sécuritaire à la police en Haïti, a dit la numéro deux du département d’Etat américain, Victoria Nuland, après une réunion ministérielle sur Haïti en marge de l’Assemblée générale. Elle s’est refusée à nommer les pays mais la Jamaïque, les Bahamas et Antigua-et-Barbuda ont fait savoir qu’ils y participeraient. Le Kenya, qui s’est porté volontaire pour diriger la force, a proposé de fournir 1 000 membres de forces de sécurité. Les Etats-Unis entendent fournir un important soutien logistique − transport aérien, communications, logement, médical −, mais pas de forces de sécurité au sol a priori.

« Cette mission de soutien ne se substituera pas à des progrès sur le plan politique », a déclaré le chef de la diplomatie américaine, Antony Blinken, lors de la réunion, disant espérer que cette force puisse être « déployée d’ici à quelques mois » car « il n’y a pas de temps à perdre ». Le secrétaire d’Etat a également annoncé que le gouvernement de Joe Biden allait demander au Congrès 100 millions de dollars (94 millions d’euros environ) pour la financer. Celle-ci doit avoir une importante composante de police mais aussi militaire en soutien à la police haïtienne.

Sa mission sera d’apporter un soutien opérationnel à la police, d’assurer la sécurité d’installations critiques et des voies de circulation et de renforcer la police à long terme. Elle attend désormais un feu vert du Conseil de sécurité de l’ONU pour être mise sur pied, même si elle ne se ferait pas sous drapeau onusien.

Les Haïtiens « souffrent depuis trop longtemps »

La première ministre de la Barbade, Mia Mottley, a dit « espérer que les membres du Conseil de sécurité admettront qu’ils ne peuvent pas se servir de Haïti comme d’un pion, car [les Haïtiens] souffrent depuis trop longtemps, entre les mains de beaucoup trop de pays », sans être plus précise.

Un projet de résolution préparé par les Etats-Unis et l’Equateur doit être discuté la semaine prochaine à l’ONU, a déclaré Mme Nuland, en faisant part « d’un fort soutien » pour ce texte. A l’ONU mardi, le président américain, Joe Biden, avait appelé le Conseil de sécurité à « autoriser maintenant » l’envoi en Haïti d’une force multinationale car « le peuple d’Haïti ne peut pas attendre plus longtemps ».

Son homologue kényan, William Ruto, a fait de même jeudi, jugeant « hors de question » d’abandonner une population terrorisée par les gangs.

Depuis près d’un an, Ariel Henry, fragilisé à défaut d’élections dans son pays depuis 2016, réclame l’envoi d’une telle force. Mais la communauté internationale, échaudée par les expériences passées et les risques de se retrouver piégée dans un bourbier meurtrier, peine à se mobiliser.


Crédit: Radio Internationale d'Haïti avec AFP 

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